Par: Alexandra Boileau

La présence d’élus politiques sur les comités citoyens – de liaison, de vigilance, de suivi, de voisinage, de cohabitation, etc. – est une question constamment soulevée lors de leur création.

Sur le terrain, plusieurs situations peuvent être observées sur les façons dont cet enjeu est pris en charge par divers comités :

  • Des élus sont membres de nombreux comités, comme représentants du milieu municipal, dans une proportion estimée à environ 50% des comités existants connus.
  • Dans les autres cas sans élus, les représentants du milieu municipal sont des fonctionnaires désignés par les élus provenant généralement des secteurs de l’environnement, de l’aménagement, des communications, ou plus particulièrement des relations communautaires si ce service est présent dans la municipalité.
  • Enfin, on constate que des élus sont systématiquement présents lorsque des comités sont créés par une initiative municipale, agissant même parfois comme présidents ou animateurs.

Les risques pour le bon fonctionnement

L’expérience sur le terrain démontre que dans plusieurs cas la présence d’élus politiques dans la composition d’un comité peut représenter une difficulté pour son bon fonctionnement, particulièrement quand ces comités sont créés ou interviennent dans des situations conflictuelles.

La présence d’élus est alors remise en question et non souhaitable pour plusieurs raisons :

  • Les élus sont des décideurs en autorité sur des enjeux ou projets susceptibles d’être débattus par les membres du comité, par exemple pour l’émission de certificats de conformités pour des projets ou pour l’application de règlements sur le contrôle des nuisances.
  • Avec la présence d’élus, il y a un risque de politisation des débats, les membres profitant de la présence et d’échanges directs avec les élus pour affirmer leurs positions.
  • Les échanges et débats peuvent soulever des responsabilités et des enjeux municipaux, ne relevant pas du mandat des comités, sur des sujets qui par exemple devraient être abordés lors de réunions du conseil municipal ou des commissions municipales en place.
  • Des membres peuvent être portés à s’autocensurer et à limiter leur liberté d’expression par crainte de représailles politiques.
  • Certains échanges peuvent être teintés par la partisanerie, particulièrement durant les périodes électorales.
  • L’engagement politique de certains membres par rapport aux élus municipaux peut influencer les échanges et les avis des comités.
  • Les élus disposent d’autres forums et plateformes pour exprimer les attentes, opinions et demandes à l’entreprise initiatrice du comité, dans plusieurs cas les instances municipales et l’entreprise initiatrice du comité préférant recourir à la formule des tables de concertation élus-municipalités-entreprise pour disposer des questions relevant des municipalités.

Une solution : l’encadrement des contributions

Dans les situations où la présence d’élus dans la composition d’un comité est inévitable pour diverses raisons, notamment la volonté ferme d’élus de participer directement aux activités d’un comité, des modalités de fonctionnement doivent être adoptées pour encadrer cette participation des élus.

Des conditions peuvent être définies pour prévenir les inconvénients et les difficultés possibles, de même que les risques de dérapages dans les échanges :

  • Un « briefing » doit être fait avec les élus membres pour une bonne compréhension du fonctionnement du comité et pour définir un cadre approprié pour leurs interventions.
  • Les élus doivent adopter une approche de « réserve » ou même de non contribution aux décisions du comité dans les cas où les dossiers débattus concernent leur municipalité, ce qui peut amener des élus à se retirer de certains échanges.
  • Dans l’ensemble de leur participation au comité, les élus gagnent à être en mode « écoute » et à éviter les prises de position à caractère politique, par exemple en se limitant à transmettre une position officielle du maire ou du conseil municipal.
  • Les élus doivent être conscients et admettre le fait qu’ils sont membres comme les autres, sans privilèges tels qu’un droit de parole prioritaire ou de véto, et que toutes les opinions peuvent être exprimées et doivent être respectées.
  • Les élus membres doivent être prudents dans leurs relations non officielles avec l’entreprise initiatrice en dehors des activités du comité.
  • Les élus doivent être avisés de la nécessité d’une cloison étanche entre leurs responsabilités municipales et les activités du comité.
  • Dans les comités mis sur pied par des municipalités, des efforts spéciaux doivent être faits pour rassurer les membres sur le caractère non politique de l’initiative, ce qui peut être très difficile lors les travaux de comités portent sur des responsabilités ou enjeux municipaux.

L’animation au cœur du succès des comités

L’enjeu de la présence d’élus dans un comité citoyen appelle une bonne collaboration de l’ensemble des membres du comité, ainsi que des représentants de l’entreprise et des personnes-ressources qui sont affectées au soutien du comité. Mais essentiellement, c’est une responsabilité délicate de l’animateur de s’assurer du bon fonctionnement du comité incluant des élus membres, il revient notamment à l’animateur :

  • De s’assurer que les échanges restent pertinents au mandat du comité.
  • D’éviter que les discussions se déplacent vers des enjeux politiques et municipaux.
  • De voir à ce que les relations entre les élus et les autres membres restent neutres et non partisanes.
  • De traiter tous les membres sur le même pied et équitablement, sans considération spéciale pour les élus.
  • De vérifier que les élus acceptent le cadre de leurs interventions.

Le rôle particulier de l’animateur face aux élus membres d’un comité fait appel à une combinaison de diplomatie, de respect et de rigueur, ce qui fait partie de son devoir d’indépendance, d’impartialité et d’équité par rapport à l’ensemble des membres d’un comité citoyen.