Par: Marie-Ève Perreault

Les Parcs naturels régionaux (PNR) sont des aires de préservation naturelle françaises qui prennent également en considération la dimension humaine et culturelle du territoire. Il s’agit d’un modèle unique dans le monde qui innove tant par son approche de préservation que par sa gestion collaborative du territoire. Ce concept innovant, mais non sans failles, pourrait inspirer des structures et des manières de faire au Québec.

Les Parcs naturels régionaux en bref

Les PNR sont un concept innovant de protection territoriale qui a pour but la protection et la valorisation intégrée du patrimoine naturel, culturel et humain. Partant du principe que les activités humaines ne sont pas nécessairement opposées à l’équilibre des habitats naturels, les Parcs naturels régionaux sont articulés autour d’une gouvernance concertée où l’innovation sociale est à l’avant-plan. Ce modèle novateur que de nombreux pays tentent d’exporter l’est toutefois moins quant à la place réservée aux citoyens.

Des territoires protégés, mais habités

Les Parcs naturels régionaux sont des territoires ruraux reconnus pour leur valeur patrimoniale et paysagère, mais également pour leur fragilité causée par la pression urbaine ou par une surfréquentation touristique. Au total, on dénombre 56 PNR qui s’étendent sur 15% du territoire de la France où habitent près de 4 millions de personnes. Plus de 320 000 entreprises y fleurissent, soit 7% du tissu économique français. Loin des principes de conservation environnementale rigoureux appliqués chez nous, en Amérique du Nord, ils sont des territoires ouverts, non figés et habités. En reconnaissant que les pratiques humaines forgent depuis des centaines d’années les paysages d’aujourd’hui, l’approche des PNR vise l’intégration raisonnée des activités économiques et culturelles à la protection de l’environnement. L’application des principes de développement durable se reflète également dans le projet territorial autour duquel est articulée leur gestion.

Le Parc naturel régional des Volcans d’Auvergne

L’Auvergne est une région centrale reconnue pour ses riches paysages volcaniques et pour ses généreux espaces verts façonnés par le pâturage en montagne. Le Parc naturel régional des volcans d’Auvergne est le plus vaste PNR de France. En plus des paysages montagneux uniques, le PNR auvergnat valorise et préserve les traditions rurales liées à l’estive, à la valorisation de la pierre volcanique et de l’eau de source. Le PNR a initialement été créé pour contrer les effets de la dévitalisation rurale et de l’enclavement de la région et pour préserver les paysages uniques de moyennes montagnes.

Puy-de-Sancy

Le Massif du Sancy fait partie du Parc naturel régional des Volcans d’Auvergne.

Une gouvernance concertée

La gestion territoriale des Parcs naturels régionaux est organisée autour d’un projet concerté de développement durable où les politiques d’aménagement et de développement économique, social et culturel sont respectueuses de l’environnement.

À la création d’un PNR, les acteurs locaux se dotent d’un projet de territoire qui répond aux grands enjeux territoriaux et qui est concrétisé par une charte. Une structure intermunicipale qui regroupe des représentants des différents paliers de gouvernement, nommé syndicat mixte, gère la charte et ses grandes orientations. L’adhésion des parties prenantes au projet et à la charte est faite sur une base volontaire et le syndicat mixte n’a pas de pouvoir réglementaire. Il est donc impératif qu’un large système de concertation et de mobilisation soit mis en place afin de maintenir une forte adhésion. Des représentants des milieux communautaires, socio-économiques et publics sont représentés dans différents organes consultatifs, comme des commissions de travail ou dans le cadre de projets spécifiques. L’approche se veut collaborative, plutôt que coercitive.

Des zones grises qui favorisent l’innovation sociale

Cette structure de gouvernance innovante et l’approche intégrée de conservation comportent certainement leur lot de défis, mais laissent également place à l’innovation. En effet, chaque Parc naturel régional est amené à concrétiser des projets qui oscillent entre la protection et le développement, qui répondent à des enjeux à la fois locaux et globaux et qui auront un effet à court, mais aussi à long terme. Ces paradoxes mènent chaque PNR à trouver leur zone de confort collective et à se renouveler sans relâche dans la recherche de solutions.

Concrètement, l’innovation se retrouve dans des projets techniques comme l’habitation et la mobilité durable en milieu rural, ou dans des projets de limitation de l’affichage publicitaire, par exemple. Cela dit, la réelle valeur ajoutée des parcs se trouve dans l’innovation sociale; des partenariats audacieux entre des chasseurs et des chercheurs en biologie, le travail de concertation, de médiation, de mise en valeur des compétences et de mise en relation afin de construire une dynamique et une identité territoriale spécifique.

Une implication citoyenne limitée

La formule des Parcs naturels régionaux a l’apparence d’être un véritable modèle innovant de concertation, mais la réalité n’est pas sans faille. En effet, l’exercice des PNR aurait pu être une belle occasion de réserver une place privilégiée aux citoyens et à leur fine connaissance de leur milieu de vie. Seulement, la place citoyenne est cantonnée à un organisme bénévole nommée Association des amis habitants et usagers du Parc. Cet organisme se positionne principalement comme animateur territorial en organisant des activités découvertes sur le patrimoine naturel, culturel et humain. L’expertise citoyenne est donc valorisée auprès d’autres citoyens, mais ne rencontre pas les experts ni les représentants municipaux au bénéfice de projets structurants.

Le système et les institutions françaises sont connus pour leur haut niveau de complexité hiérarchique, où l’expert et ses connaissances triomphent. Cette vision top-down valorise le statut et le savoir académique et laisse peu de place à l’expertise d’usage, l’expertise citoyenne.

Un modèle applicable au Québec?

Cette approche verticale descendante de la participation citoyenne dans le processus décisionnel des PNR est une construction culturelle française. Au Québec, aucune structure n’a pour mission de favoriser à la fois le développement économique, culturel et environnemental d’une région. À chaque mission son organisme, un découpage sans paradoxe, ni zones grises. Toutefois, les processus, les manières de faire et le rapport que l’on entretient avec l’autre au Québec favorisent l’expression, la contribution citoyenne et la recherche de consensus dans les projets structurants.

En définitive, le concept des Parcs naturels régionaux est inspirant, innovant et est une réelle application des principes de développement durable. Bien que ce modèle n’ait pas d’équivalent au Québec, il serait certainement intéressant de s’inspirer de gestion collaborative dans la gestion des MRC ou dans la création de parcs naturels.

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