Par: Alexandra Boileau

La Loi sur les mines, dans ses dispositions sur les comités de suivi, inclut une obligation pour les comités de choisir des modes privés de prévention et de règlement des différends.

Une obligation légale

« En vertu du Règlement, le comité de suivi doit, dès sa première réunion, choisir des modes privés de prévention et de règlement des différends, dans le but de prévenir un différend pouvant naître entre les membres du comité à l’égard de son fonctionnement. Il doit également choisir, d’un commun accord avec l’exploitant minier, des modes privés de prévention et de règlement des différends pouvant naître entre eux, notamment à l’égard des renseignements et des documents demandés à l’exploitant minier, des dépenses du comité de suivi et du soutien technique requis par le comité » (Article 42.3).

Le comité comme tel est un moyen de prévention des conflits, dont le processus est inscrit dans son mode de fonctionnement. Par contre, les modalités de fonctionnement de tels comités ne prévoient habituellement pas de processus ou mécanisme de règlement de différends. L’exigence de la Loi des mines oblige désormais les comités à convenir d’un processus en ce sens et à l’inscrire dans son mode de fonctionnement. Le processus à prévoir qui doit être élaboré devrait s’inspirer des modes « classiques » de résolution des conflits, par exemple celui de la médiation environnementale en usage au BAPE.

L’expérience du BAPE

La définition de la médiation adoptée par le BAPE est la suivante :

« Mode amiable de règlement des conflits dans lequel un tiers, impartial, amène les parties à trouver une solution à leur différend. »

La médiation environnementale est présentée par le BAPE comme une solution de rechange (aux tribunaux) pour régler des conflits. Dans le cadre d’une revue des processus de médiation en place dans divers organismes, le BAPE a dégagé des points communs à tous :

« Pour tous, les modes de fonctionnement ou les procédures d’opération ainsi que les méthodes d’approches appartiennent au médiateur, pourvu que les règles soient établies au départ et acceptées par les parties. Les rencontres peuvent être individuelles ou conjointes ou peuvent même se faire par téléphone. »

Dépendant de la nature du conflit et de l’état des relations entre les parties en présence, la maîtrise d’œuvre de la médiation sociale pourrait être confiée à un seul médiateur ou à un tandem de deux médiateurs désignés par chacune des parties. Le recours à des experts par le médiateur est possible, à condition d’avoir l’accord des parties. Les experts consultés ne peuvent être à la table de médiation. Le médiateur joue un rôle actif d’accompagnement des parties pour identifier les solutions au conflit et parvenir à une entente. Le nombre de rencontres des parties requises, séparément et conjointement, est laissé au jugement du médiateur et à la volonté des parties. Sous le leadership du médiateur, les parties à la médiation restent responsables du contenu des échanges, de la recherche de solutions au conflit et de l’élaboration d’une entente entre elles. À tout moment, il revient au médiateur de mettre fin à la médiation s’il considère que toute entente est impossible.

Une médiation adaptée

Dans le cas des comités de suivi, on pourrait alors parler d’un processus de « médiation sociale », mettant en présence les membres du comité entre eux, ou les membres du comité et l’entreprise minière initiatrice du comité. En s’inspirant de la procédure de médiation environnementale du BAPE et en l’adaptant à la situation des comités de suivis, un mode approprié de règlement des différends peut être adopté par les membres et inscrit dans le document de constitution du comité.

Dépendant de la nature du conflit et de l’état des relations entre les parties en présence, la maîtrise d’œuvre de la médiation sociale pourrait être confiée à un seul médiateur ou à un tandem de deux médiateurs désignés par chacune des parties.

Un travail important du ou des médiateurs est nécessaire après les rencontres séparées pour la préparation de la rencontre conjointe en vue de s’assurer de l’efficacité de cette rencontre. Ces travaux s’appuient sur les contenus des échanges lors de rencontres séparées des parties. Le ou les médiateurs pourront devoir faire, de façon discrète et séparée auprès des parties en présence, des vérifications et des validations préalables, par exemple de la synthèse de la problématique, des hypothèses de solutions, et des possibilités d’entente. De plus, selon la complexité du différend et la difficulté d’amener les parties à une entente, cette étape peut supposer la tenue de plusieurs rencontres conjointes des parties, et d’autant de rencontres séparément avec chacune des parties pour en arriver à un degré d’acceptabilité consensuel des solutions et de l’entente examinées et proposées.

Une procédure légère

Le processus de médiation sociale se déroule en plusieurs étapes mettant à contribution le ou les médiateurs, les membres du comité et l’initiateur. Elles concernent plus directement les deux parties en conflit ou au cœur d’un différend.

Certaines activités sont préalables à la médiation et contribuent à sa mise en place. D’autres constituent la médiation comme telle.

Activités préalables à la médiation :

  • Choix du médiateur ou des médiateurs :
    • Proposition et acceptation conjointes d’un médiateur
    • Proposition d’un médiateur par chacune des parties
    • Acceptation des médiateurs par les deux parties
  • Élaboration et acceptation du processus :
    • Proposition par le(s) médiateur(s) du plan de travail pour la médiation
    • Acceptation séparément par chacune des parties en présence
    • Confirmation consignée et formelle de l’acceptation présentée lors de la rencontre conjointe des parties

Activités de médiation :

  1. Rencontres séparées et privées des parties par le(s) médiateur(s) :
    • Confirmation de l’acceptation du ou des médiateurs
    • Confirmation des représentants et porte-paroles de la partie pour la médiation
    • Acceptation par chacune des parties séparément de la proposition de médiation
    • Délimitation des enjeux du différend, des intérêts et des attentes de chacune des parties
  2. Rencontre conjointe des parties
    • Confirmation formelle consignée de l’acceptation de la proposition de médiation
    • Acceptation par chacune des parties des représentants de l’autre partie
    • Présentation par le(s) médiateur(s) d’une synthèse de la situation perçue suite aux rencontres privées des parties (problématique, enjeux, motifs, sujets possibles d’échanges)
    • Discussions pour la validation de l’état de situation présenté
    • Hypothèses et pistes de solutions élaborées par le(s) médiateur(s)
    • Échanges dirigés par le(s) médiateur(s) pour rechercher le consensus des parties sur les solutions proposées et les ajustements requis pour susciter l’adhésion des parties à des solutions conjointes acceptables
    • Validation des solutions consensuelles auprès des parties représentées à la médiation
  3. Signature de l’entente
    • Consignation par le(s) médiateur(s) dans un document d’entente des solutions acceptées par les parties
    • Validation du document d’entente et signature de l’entente par les représentants des parties en présence et par le(s) médiateur(s) comme témoins

Pour éviter d’alourdir le fonctionnement et de causer des délais dans les activités des comités de suivi, un processus souple et rapide est nécessaire. Idéalement, un processus de médiation sociale à l’intérieur d’un comité de suivi devrait pouvoir être complété en 3 rencontres au maximum, l’une séparément avec chacune des parties, et l’une conjointement avec les deux parties.

Référence : « La médiation en environnement : une nouvelle approche au BAPE, BAPE, Québec, Juin 1994) »